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Une visite à Edvard Munch

2017.

Je viens de lire « Une visite à Edvard Munch, 1927 » de Curt Glaser, publié dans la collection envois de l’Echoppe.

On y apprend que Munch aimait vivre dans un un environnement qui correspond finalement à de nombreux artistes : pièces d’habitation meublées avec le minimum, comme des cellules monastiques; la recherche d’une certaine simplicité, et d’une solitude nécessaire à la création.

L’atelier est partout. La pensée du travail artistique obsède. La difficulté de se séparer de ses toiles. La nécessité de les avoir autour de soi pour les avancer à tout moment. Munch donnait des prix très élevés à ses tableaux pour décourager les éventuels acheteurs. Il vendait et exposait très peu. Dans ses réserves, ses tableaux s’abîmaient, se perçaient. Parfois il en détruisait volontairement; il émettait aussi la possibilité de tout détruire avant sa mort.  Ses ateliers en bois étaient très froids. Ses toiles s’entassaient dans la neige qui venait jusqu’à l’intérieur. Munch gardait ses anciennes toiles pour pouvoir les retravailler, même longtemps après, des années après. Et il faisait souvent plusieurs versions d’un même motif.

« La Puberté » est un tableau de Munch que j’aime particulièrement. Datant des années 1894-1895, il est la deuxième version d’un autre tableau disparu, détruit dans un incendie. L’ombre irréelle, protubérance arrondie, spectre qui vient matérialiser picturalement l’angoisse du personnage assis, l’expression du visage, l’anatomie mouvante-émouvante, me font rapprocher ce tableau de la manière de Goya.

J’en profite pour évoquer l’ouverture récente d’un nouveau Musée à Anvers: Le Musée de Reede. Ce Musée se concentre particulièrement sur l’Art Graphique de Goya, Rops et Munch.

2022.

Je reprends la suite de mon court article après avoir vu l’exposition Munch au Musée d’Orsay, cet automne, à Paris.

M’ont frappé « La puberté », enfin rencontrée, et les lithographies. Les dessins plus noirs, plus simples, plus contraints par quelques couleurs ou traits. « La puberté » au contraire, grande, immense, et très complexe, où s’additionnent les nuances. Des variations de brosses et de pigments qui dans leurs décalages, orientent la matière, et ce qui reste au regard.

La lumière de la peinture à l’huile nait des interpénétrations et juxtapositions des pigments. L’huile travaille les transparences, les minéralités, les reflets de nacre et les enchevêtrements de matières solidifiées. La figure prise dans le dessin garde une présence sacrée, graphie primitive et dense, enregistrement né d’une ancienne magie.

Munch avait ce caractère qui fait le peintre. Un individu hors du temps et hors des modes. Celui qui dévie la matière pour en faire, loin des technologies, des représentations, des images et des espaces de ce qu’on voit, ou de ce qu’on peut voir, et ressentir. Comme la musique qui vient prendre l’espace et le temps, les pigments ordonnés par l’homme viennent s’ajouter aux puissances de la nature. Il en résulte des forces, des signes et des griffes, des formes, des taches, des rythmes, des couleurs des paroles sans mots sur des papiers ou des toiles.

© Gabriel Delmas